Les groupes électrogènes, une réponse aux enjeux actuels de flexibilité énergétique

La crise énergétique de 2022/2023 a fait brusquement émerger la flexibilité électrique en tant qu’élément essentiel de l’équilibre offre-demande du système électrique, qui devait être développée de manière urgente. Depuis cette crise énergétique, les besoins en flexibilité ont changé de nature tout en conservant la forte attention dont ils font l’objet. Parmi l’ensemble des solutions susceptibles de répondre à ces besoins, les groupes électrogènes sont un levier sous-exploité malgré son potentiel très important.
Période pré-2010 : un rôle actif dans l’effacement
Avant 2010, les groupes électrogènes participaient en effet activement aux mécanismes d’effacement. Le dispositif EJP (Effacement Jour de Pointe) permettait d’inciter les utilisateurs industriels et tertiaires à limiter leur consommation lors des pics de demande, en activant leurs groupes électrogènes. Le GIMELEC avait ainsi recensé en 2016 une capacité de 6 GW, soit près de 7 % de la demande de pointe à l’époque, répartie de manière homogène sur le territoire. Toutefois, avec la fin des tarifs EJP et la transition vers des mécanismes de marché, l’utilisation des groupes électrogènes pour l’effacement s’est progressivement réduite. En 2014, seuls 10 % de la puissance installée étaient encore mobilisés dans ce cadre, contre 31 % en 2010. Depuis, l’essentiel des solutions installées répondent à des besoins de secours et ne fonctionnent qu’une poignée d’heures par an.
Crise de 2022/2023 : une mobilisation renforcée et un nouveau cadre réglementaire
La crise de 2022/2023 a conduit le GIMELEC à travailler avec RTE pour identifier des solutions face aux tensions sur l’approvisionnement électrique. Au-delà du dispositif « Ecowatt » qui a fait l’objet d’une intense promotion, une autre mesure plus discrète a été l’adoption de la loi MUPPA (dite « pouvoir d’achat ») qui impose aux propriétaires de groupes électrogènes d’une puissance supérieure à 1 MWe de formuler une offre sur le mécanisme d’ajustement, l’un des marchés de la flexibilité en France. Ce changement réglementaire a acté la réintégration des groupes électrogènes existants dans les stratégies de flexibilité du réseau électrique.
Un potentiel croissant avec le développement des data centers
Par ailleurs, depuis les années 2010, la capacité installée des groupes électrogènes a augmenté, notamment en raison de la croissance du secteur des data centers.
En 2023, les estimations indiquaient une capacité d’environ 10 GW, avec une forte concentration en Île-de-France et en PACA, régions qui concentrent une part importante des infrastructures numériques. Cette évolution renforce ainsi le rôle potentiel des groupes électrogènes dans la gestion des pics de consommation et des événements de tension sur le réseau.
« Au-delà de leur rôle traditionnel de secours, ces systèmes représentent un potentiel de flexibilité considérable, capable d’accompagner l’évolution du mix énergétique. Le parc installé, en tenant compte de la forte croissance du secteur des data centers en France, pourrait atteindre 14 GW d’ici 2035. Exploiter pleinement cette ressource contribuera à un réseau électrique plus optimisé, résilient et respectueux de l’environnement. »
Joël Vormus – Délégué Data Centers du GIMELEC
Les enjeux environnementaux et la transition vers des solutions plus durables
L’un des principaux défis des groupes électrogènes reste leur impact environnemental, en particulier pour ceux fonctionnant au Diesel. Toutefois, des solutions existent désormais pour réduire significativement leur empreinte carbone et leurs émissions de polluants :
- Utilisation de carburants alternatifs type HVO (Hydrotreated Vegetable Oil) : ce biocarburant permet une réduction des émissions de CO₂ de 60 à 80 % par rapport au Diesel fossile.
- Amélioration de l’efficacité des systèmes de filtration pour limiter les émissions de NOx et de particules fines.
Toutes les données, sauf celles pour les groupes électrogènes, proviennent de RTE, calculées à partir de la base carbone de l’ADEME, pour obtenir le facteur d’émission des combustibles (gaz, charbon et fioul), et les guidelines de l’ENTSO-E pour définir le rendement type des centrales. RTE compte les émissions du nucléaire et de l’hydroélectricité comme nulles en comparaison des autres.
Fioul domestique : valeur énergétique 0,324 kg CO2 / kWh PCI (Source : Ademe)
Rendement générateur : 39 % (chiffre GIMELEC)
HVO : valeur énergétique 0,057-0,114 kg CO2 / kWh PCI (Source : Ademe)
Rendement générateur : 38 % (chiffre GIMELEC)
Conclusion
La crise énergétique de 2022/2023 a mis en évidence le rôle important des groupes électrogènes dans la flexibilité du réseau électrique. Leur potentiel est désormais mieux reconnu et leur intégration au mécanisme d’ajustement ouvre la voie à une utilisation optimisée. Avec une transition progressive vers des carburants alternatifs et un cadre réglementaire adapté, les groupes électrogènes peuvent jouer un rôle actif dans la réduction des émissions tout en renforçant la sécurité énergétique.
Au-delà de leur fonction traditionnelle de secours, ils sont un potentiel de flexibilité important à même d’accompagner l’évolution du mix énergétique : le parc installé, eu égard à la croissance forte du secteur des data centers en France, pourrait atteindre 14 GW en 2035. Mobiliser pleinement ce gisement, c’est contribuer à un réseau électrique plus optimisé, résilient, et respectueux de l’environnement.
A propos du GIMELEC
Le GIMELEC fédère les entreprises de la filière électronumérique française. Nos 210 adhérents conçoivent, fabriquent et déploient les solutions d’électrification, d’automatisation et de digitalisation pour l’industrie, les bâtiments, la mobilité, les infrastructures énergétiques et numériques.